LA MARCHE (OU LA CREUSE), C'EST DU BETON !
Avant la Révolution française, le Creusois se nomme le Marchois (et la Creuse s'appelle la Marche)... ça, tout le monde le sait ! Mais qui peut dire pourquoi 1 Marchois sur 10 est devenu maçon migrant ? Plusieurs explications existent et certains affirment (avec un bel applomb) que la raison N°1 se trouve sous les pieds des Marchois, là ou se trouve une ingrate couche de terre...
Cette maigre terre végétale recouvre un tuf jaunâtre (que les paysans marchois utilisent depuis des lustres comme mortier) ou un dur granit (qu'ils s'échinent à tailler pour en faire des pierres de construction). Donc... des blocs à maçonner et du mortier ! Mais... Fichtre diantre ! Le Marchois était donc destiné depuis longtemps à devenir maçon ? C'était donc "écrit" ! (voilà, c'est tout chers lecteurs ! Au revoir) !
Une autre raison est que la propriété du paysan marchois est si petite qu'elle suffit à peine à nourrir sa famille (et qu'il ne peut espèrer louer ses bras sur une grande propriété car... il n'y en a pas). Cette raison, combinée à la N°1, fait que (donc) 1 Marchois sur 10 (le plus pauvre) va répondre à l'appel de Richelieu et va partir loin de chez lui pour construire les remparts de La Rochelle.
Sa descendance oeuvre ensuite à Paris, à Lyon, à Bordeaux, en Franche-Comté, en Dordogne ou dans les Hautes-Alpes (et entre décembre et mars, elle regroupe astucieusement ses congés avec ses RTT pour rentrer au pays !). En son absence, sa famille a une bouche de moins à nourrir et, quand il revient, il ramène un peu d'argent... qui sert à payer les charges et les impôts.
En 1698, les archives royales recensent 6.000 migrants marchois mais leur nombre double en 1763. A la veille de la Révolution, il est désormais question de 20.000 maçons marchois migrants. Puis, les Creusois se mettent à faire beaucoup d'enfants : au 19ème siècle, le nombre de maçons migrants explose donc et certains partent désormais avec femme et enfants...
Ils sont maintenant 30.000 (accompagnés par 4.000 épouses), en majorité des maçons mais également quelques tailleurs de pierre, quelques charpentiers et quelques scieurs de long (15% d'entre eux, qui partent pour la 1re fois, sont des apprentis qui ont entre 10 et 15 ans. 60% sont de jeunes adultes âgés de 15 à 30 ans. Les "vieux", ceux qui ont plus de 30 ans, ne représentent que 25%... et ils sont usés).
Certains d'entre eux reviennent en Creuse tous les ans, d'autres tous les 2, 3, 4 ou 5 ans. D'autres encore ne reviennent plus (en toute logique, ceux qui sont partis avec leur épouse et leurs enfants !). Et puis il y a ceux qui ne reviennent que pour leur retraite, au 20ème ou au 21ème siècle... Fichtre diantre ! C'était pas écrit ça ! Qu'ils étaient destinés à redevenir Creusois !