CHAPITRE 4 (DE LA SAGA DU LAC DE CHAMBONCHARD)
Fin septembre 1996, à l'appel d'une douzaine de sociétés de pêche et d'associations écologistes qui refusent de s'avouer vaincus, 250 personnes se réunissent à Chambonchard pour un dimanche avant tout festif. Entre les spectacles folkloriques locaux et les animations diverses, tous sont venus là pour affirmer que la lutte contre la construction du barrage va continuer !
Les quelques 800 millions de francs du coût des travaux sont mis en parallèle avec les 50 millions de rénovation de la station d'épuration que Montluçon peine à trouver ! Des voix s'élèvent également pour dénoncer le fait que, ces 10 dernières années, la pollution aux nitrates a été multipliée par 2 dans le bassin versant de la Loire. Et tous sont convaincus d'une chose...
Ils se disent certains que les "décideurs" se moquent de savoir si le barrage sera utile ou pas et si ses dégats seront irréversibles... Bref, les opposants sont en colère ! En février 1997, le démarrage des travaux est annoncé pour le mois suivant. Pierre Goldberg, maire communiste de Montluçon et président du comité pour le barrage, demeure cependant sur ses gardes...
En effet, Corinne Lepage, ministre de l'Environnement du gouvernement d'Alain Juppé, vient de déclarer qu'elle n'est "pas vraiment fanatique des barrages" ! Pour leur part, les petites entreprises locales craignent avant tout de n'avoir que les miettes de l'énorme gâteau financier que les entreprises nationales (qui viennent de répondre aux appels d'offres) lorgnent en salivant !
Par ailleurs, un groupe d'associations de protection de l'environnement vient de déposer plusieurs recours devant la justice. Ces recours ne sont cependant "pas suspensifs". En septembre 1998, Dominique Voynet, la ministre de l'Ecologie du gouvernement de Lionel Jospin se dit hostile à la construction du barrage de Chambonchard et également contre son financement.
Mais, le 16 avril 1999, le Conseil d'Etat contredit la ministre en se prononçant pour la construction du barrage... Re-coup de théâtre en juillet : un comité interministériel décide que l'Etat annulera désormais sa participation financière au projet. Puis, le 4 août, le premier ministre Lionel Jospin annonce l'abandon définitif de la construction du barrage de Chambonchard...
La nouvelle est confirmée une 1ère fois en 2000, par la ministre Dominique Voynet, et une 2nde fois en 2002 par Roselyne Bachelot, sa remplaçante. L'Etablissement Public d'Aménagement de la Loire et de ses Affluents (EPALA) qui a dépensé 93 millions pour rien, attaque en justice son patron, l'Etat français donc, et demande à être remboursée...
L'EPALA est déboutée par le Tribunal administratif d'Orléans. Mais, après un procès en cour d'appel et un autre en cour de cassation, l'Etat et les gentils petits contribuables (nous donc) devons rembourser la somme de 1,9 million de "frais d'études" à l'Agence de l'eau des Pays de Loire-Bretagne (laquelle se substitue désormais à l'ancienne EPALA)...
En 2023, ayant à l'évidence bien retenu les leçons du passé, l'Etat accepte de financer 70% du coût d'autres superbes projets aquatiques. Ils consistent à pomper de l'eau dans la nappe phréatique pour remplir de gigantesques bassins artificiels, à l'air libre, afin de permettre à 4% des agriculteurs français d'arroser leurs maïs et leurs blés... avec ce qui ne se sera pas évaporé au soleil !