LA DESTRUCTION D'UN MONUMENT HISTORIQUE QUI AVAIT POUR NOM "MANOIR DE LAVAUD"
Le manoir de Lavaud (à Saint-Maurice-la-Souterraine) date du 15ème siècle. Ce petit bijou, qui traverse les siècles sans subir la moindre modification, va connaître une triste fin 500 ans plus tard. En effet, en 1992, la société familiale des carrières Iribarren achète les terrains qui l'entourent et, sans avoir l'ombre d'une autorisation administrative, commence à creuser...
Le classement du manoir est lancé par les Monuments Historiques (le 22 février 1993) "en raison des menaces causées par un projet d'exploitation de carrière dont les travaux préliminaires ont commencé". Quant à la DRAC (Direction Régionale des Affaires Culturelles), elle obtient un Arrêté d'occupation temporaire l'autorisant à faire des travaux de consolidation... mais Iribarren s'y oppose !
Le manoir de Lavaud est inscrit (le 10 janvier 1994) à l'Inventaire Supplémentaire des Monuments Historiques quand, subitement, il est la proie d'actes (anonymes et répétés) de vandalisme : des piliers de maintien des poutres du toit sont retirés, des cheminées détruites et des murs éventrés. Ces dégradations entrainent l'écroulement de la toiture et de l'étage...
La DRAC et la FLAPNa portent alors plainte auprès du Tribunal de Grande Instance de Guéret (le 21 février 1994). Dans la foulée, la Commission Départementale de la Creuse donne un avis défavorable à l'exploitation de la carrière et il est même ordonné à la société Iribarren de procéder à une expertise qui indique s'il existe ou pas des "vestiges archéologiques" sur le site de la carrière.
Une information contre X est ouverte (le 6 décembre) pour "dégradation ou destruction de monument" par le Parquet de Guéret. La plainte de la DRAC et de la FLAPNa ayant été classée sans suite (le 16 juin 1995), Jean Godfroid, préfet de la Creuse, donne à Iribarren l'autorisation d'exploiter la carrière de Lavaud (le 24 décembre)... malgré l'avis défavorable de ses propres services !
L'affaire rebondit (en juin 1996) quand le tribunal administratif de Limoges désavoue le préfet de la Creuse et annule pour "erreur d'appréciation" l'autorisation d'exploitation qu'il a accordée. Le préfet Jean Godfroid (sauf erreur homonymique de notre part) change ensuite de carrière pour devenir (en 2009) directeur général de l'OFII (l'Office Français de l'Immigration et de l'Intégration).
Quant à la société Iribarren, elle exploite désormais 16 carrières, dont elle retire et vend des amendements agricoles, de l'argile, du sable, du gravier, de la pierre de taille, du granit et du granulat, sans parler du béton... bref, la famille Iribarren vend tout ce qu'il faut aux gens aisés pour qu'ils se fassent construire un joli petit manoir (du style, par exemple, de ceux qui existaient au 15ème siècle !).