DES LAÏQUES PENITENTS ENVAHISSENT TOUTE LA CREUSE EN QUELQUES DECENNIES !
Des frères Pénitents de confréries du sud de la France, venus en visite dans le Limousin, sont outrés de découvrir que des moines y commettent toutes sortes d'excès, ce qui (selon eux) éloignent les fidèles de la foi catholique (au profit du protestantisme), voire carrément de Dieu et de la Sainte Vierge ! Car, pour les Pénitents, un moine se doit d'avoir un comportement exemplaire !
Ils décident alors qu'il est grand temps d'investir le Limousin pour tout remettre en ordre. Et ainsi, en 1590, une 1ère confrérie de laïques Pénitents s'installe à Tulle, puis une autre à Limoges (en 1598) et une 3ème à Felletin (en 1602). Ces 3 villes étant désormais à l'abri du malin, d'autres confréries s'installent à Saint-Junien (en 1611) et à Saint-Léonard (en 1612)...
Le tour d'Aubusson arrive en 1613. D'autres confréries de Pénitents apparaissent à Guéret, Saint-Vaury, Ahun, Bellegarde, Chambon et Chénérailles aux alentours de 1630. Au final, 15 confréries sont créées en 40 ans, qu'il s'agisse de celles des Pénitents Blancs, Noirs, Gris ou Bleus (que l'on reconnait grâce à la couleur de leurs habits, qu'ils préfèrent plutôt nommer "sacs").
Quelle que soit leur couleur, tous n'ont qu'un but : rénover le christianisme (histoire de couper l'herbe sous le pied des rigoureux protestants, notamment à Aubusson). Les confréries de Pénitents sont toutes trés hierarchisées et la démocratie n'y a de place que lorsque les frères doivent voter pour accepter un nouveau membre... ou pour exclure l'un d'entre eux qui aurait fauté !
De quelle sorte de faute peut-il s'agir ? Par exemple de s'être adonné au jeu, de s'être laissé aller à danser ou être aller boire une chopine à la taverne du coin ! En gros, se comporter en paillard ! Et ne parlons même pas de ceux qui jurent ou qui blasphèment ! Bref, l'idéal du Pénitent est de rechercher sans cesse la perfection pour espérer obtenir la grâce de Dieu !
Hors de la confrérie, le Pénitent a interdiction de dire du mal d'un autre Pénitent. Mais, lorsqu'il est avec ses frères, il a obligation d'en dénoncer les défauts. Il ne doit pas fréquenter d'hérétiques et doit toujours donner une excellente image de sa confrèrie. Il se doit de participer à des processions où il marchera, priera et chantera pour entraîner les fidèles vers plus de foi...
Dans cette procession, il devra garder ses distances avec les autres Pénitents et ne regardera que le sol ou la croix. Malgré des réglements trés sévères, il arrive qu'un Pénitent s'écarte parfois du droit chemin : en 1644, l'un d'eux est exclu de sa confrérie pour violence envers un de ses parents et un autre l'est en 1669 à la suite d'une plainte des autorités... laïques.
En 1678, 6 des 11 nouveaux Pénitents Blancs d'Aubusson refusent d'acquitter à la confrèrie la totalité de leur "droit d'entrée". Le plus grave survient toutefois en 1726 et en 1743 quand une confrèrie entière s'oppose au clergé catholique. Au milieu du 17ème siècle, le nombre de nouveaux Pénitents en Creuse tombe à 19 par an (alors qu'il était de 75 à la fin du 16ème siècle !).
Après les années 1680, la discipline se relâche bigrement chez ceux qui se voulaient être les pionniers de la "contre-réforme" (opposée au protestantisme donc). Si bien que, en 1693, le clergé catholique doit les remettre (à leur tour) dans le droit chemin. Les "sauvageons" sont donc vertement priés de retrouver la discipline de leurs confréries... quelle qu'en soit la couleur !