LES VACHES DES PAYSANS MARCHOIS SONT PETITES OU GRASSES, MARCHOISES OU LIMOUSINES
Dans l'ancien (et très boisé) comté de la Marche, les paysans défrichent des prés (entourés de belles haies) et quelques parcelles où ils font pousser du blé noir pour nourrir leurs familles et, éventuellement, leurs bêtes (si la châleur de l'été n'en a pas brûlé les fleurs et si les gelées précoces d'octobre n'en ont pas détruit les grains). A l'automne, les châtaignes peuvent fournir un complément de nourriture...
Dans le district de Guéret, environ 150.000 setiers de seigle sont récoltés chaque année. Rares sont les paysans qui osent semer du blé, trop régulièrement détruit par les orages de l'été ! A la place, ils préfèrent cultiver du froment (dont ils achètent les semences dans le Berry) et peuvent ainsi s'acquitter de la "dîme du froment". En 1751, l'intendant de Guéret annonce une mauvaise nouvelle...
Selon lui, la récolte de fourrage devrait être 2 fois moins importante que les autres années ! Les vignes (qui couraient sur les coteaux sud au moyen-âge) ont été abandonnées et, désormais, les Marchois achètent leur vin à Argenton (dans le Berry). Dans leurs potagers, ils font pousser des raves, des navets et quelques fèves (la pomme de terre ne commencera à y apparaitre qu'aux alentours de 1766).
De rares noyers produisent juste assez d'huile pour les familles à qui ils appartiennent. La culture du chanvre permet de récupérer une fibre avec laquelle nos ancêtres réalisent de rugueux (mais robustes) tissus. Malgré tout, la terre et le climat de la Marche se prêtent surtout à l'élevage et chaque ville possède sa foire (telles celles d'Evaux et de Dun) où se vendent des animaux et du beurre.
Les bêtes vendues partent vers Paris et vers d'autres grandes villes du royaume. Deux races de bovins se concurrencent alors : la Marchoise (élevée dans les prairies) est robuste mais petite; la Limousine, plus grande, est achetée pour être engraissée à l'étable... Bien évidemment, seul les paysans les plus riches peuvent s'acheter ces luxueuses Limousines "à engraisser" !
Les Marchoises, quand elles sont destinées à être vendues, cessent non seulement de travailler pendant tout l'été mais sont, en outre, gavées de foin, de raves et de châtaignes pour peser plus lourd à la foire de décembre. Environ 3.000 bêtes sont vendues à celle de Guéret (les plus grasses sont achetées par des marchands étrangers, les autres finissent chez les bouchers locaux).
Les Marchois élèvent aussi de petits moutons qu'ils gardent 2 ou 3 ans avant de les vendre, principalement dans le Berry (ou dans le Bourbonnais). Ils engraissent parfois un porc (acheté dans le Berry ou dans le Poitou) qu'ils gavent de glands (quand il y a de quoi "gaver"). L'élevage des moutons et des porcs est cependant 6 fois moins important que celui (plus rentable) des bovins.
Dans la Marche du milieu du 18ème siècle, le seul élevage de chevaux dont les historiens aient retrouvé quelques traces (semble-il) est celui du domaine du château de Saint-Germain-Beaupré, qui est une des propriétés du comte de la Marche, notre bon seigneur bien aimé.