Notre aventure (chargée d'éventuelles futures polémiques) commence à Aubusson (vous acceptez d'y participer ?)... Nous quitttons la ville par l'ouest en empruntant la D17 et (aprés avoir dépassé Blessac) continuons jusqu'à l'étang de La Chaussade où nous tournons à gauche pour atteindre La Borne et ensuite La Chapelle... et sa chapelle !
Nous serrons notre auto sur le bord de l'étroite route, allons au portail de la chapelle, tirons vers nous le portillon, poussons la porte vers l'intérieur et entrons... De prime abord, seul un pieux dénuement occupe les lieux. Ce n'est qu'en partie vrai : un splendide vitrail et des boiseries sculptées (du 16ème siècle) réhaussent le choeur de cette chapelle.
A droite du choeur, un vitrail (également du 16ème) nous narre la gentillette légende qui entoure la chapelle... Sa construction a été ordonnée par le baron Charles d'Aubusson, seigneur du Monteil-au-Vicomte et de La Borne, sur les conseils de François de Viersat, abbé de Chambon (dont les armes se trouvent au dessus du portail de la chapelle).
La légende veut que Charles d'Aubusson, aprés qu'il eut failli mourir sur son cheval dans la vase d'un marais, ait été sauvé de justesse grâce à l'intervention de la Vierge. Pour la remercier, le pieux et reconnaissant Charles d'Aubusson fait donc ériger une chapelle (dédiée à Marie) dont la construction se termine en 1524, à La Chapelle.
A gauche au fond de la chapelle, une porte très discrète (et très basse) nous intrigue. Une pancarte manuscrite nous invite à baisser la tête et, donc... celà signifie que nous avons le droit d'entrer là ! Un escalier en colimaçon (de la Creuse) nous hisse dans une tour. En haut, la vue sur la charpente est extraordinaire (mais vous et nous n'irons pas plus loin !).
Nous arrivons maintenant au moment fatidique où Marchoucreuse va devoir accomplir la mission délicate qu'il s'est imposée lui-même, à savoir démollir la fallacieuse légende (dont la rédaction doit sans doute beaucoup à l'abbé François de Viersat) et rétablir (tant que faire se peut) une partie de la véritable vérité sur la chapelle de La Chapelle.
Résumons : donc le pieux Charles d'Aubusson vient, en 1524, de faire construire une chapelle dédiée à la gloire de Marie... c'est bien ça l'histoire, hein ? Mais Gilles Rossignol (qui est l'auteur d'une biographie sur les d'Aubusson, d'un Guide de la Creuse et, par ailleurs, qui est ancien attaché culturel d'ambassade et petit-fils de maçon de la Creuse) nous en dit un peu plus...
Le frère de Charles, qui se nomme Jean d'Aubusson, est le curé de La Chapelle-Taillefert et le prieur du couvent de Blessac. La prieure de ce même couvent s'appelle Françoise d'Aubusson : elle est la cousine du pieux seigneur Charles d'Aubusson et de son frère, l'ecclésiastique Jean d'Aubusson. Une belle histoire de famille commence...
En 1530, des inspecteurs de l'ordre de Fontevrault effectuent une visite de routine au couvent de Blessac et ils sont stupéfaits par les confidences qu'ils y recueillent : les nonnes accusent en effet les 2 frères et leur cousine de vivre "lubriquement" et leurs témoignages apportent de très intéressants renseignements...
La prieure Françoise d'Aubusson aurait eu 3 (voire 4) enfants dont le père serait son cousin, le baron Charles d'Aubusson. Le curé prieur Jean d'Aubusson est, quant à lui, accusé d'avoir forniqué avec plusieurs religieuses du couvent de Blessac (scandalisant ainsi les habitants de cette localité, lesquels sont au courant à cause de son manque total de discrétion).
En 1533, le curé prieur Jean d'Aubusson, qui est également accusé d'avoir maltraité le curé du château familial (à Blessac), est destitué de ses fonctions de prieur du couvent de Blessac. Puis, l'abbesse de Fontevrault obtient sa condamnation et Jean d'Aubusson est alors incarcéré à Paris (et nul n'entend plus jamais parler de lui).
Le tribunal royal de Paris s'occupe aussi du cas du baron Charles d'Aubusson, qui est (donc) accusé de luxure mais également (désormais) de pillage, d'abus de pouvoir, d'enlèvements et de sacrilèges. Le "pieux" Charles est (dans l'ordre) d'abord déchu de ses droits de seigneurie... avant d'être condamné à avoir la tête coupée.
Le 23 février 1533, le bourreau lui tranche donc la tête (à la hache), découpe son corps en 4 morceaux qui sont suspendus à l'entrée de 4 des portes de Paris, tandis que sa tête, fichée sur une lance, est ramenée en Creuse où elle est exposée à la porte d'un couvent. A Blessac, le château de la famille d'Aubusson est soigneusement rasé...
Maintenant (après une telle débauche de turpitude), nous fuyons par la D32, traversons vite la N141 et nous engageons dans la (paradisiaque) vallée de la Beauze pour arriver à Aubusson. Là (grâce à la D982), nous nous dirigeons vers Les Combes et trouvons un endroit calme au bord du lac des Combes pour méditer sur... l'âme humaine ?