Des moines rackettent Bourganeuf !
Oyez, oyez la triste histoire des malheureux habitants de Bourganeuf ! Nous sommes en avril 1308 (et oui !) et 4 des habitants de cette ville sont reçus par Foulques de Villaret, grand maître de l'Ordre des Hospitaliers. Ils ont été délégués par la population pour lui exposer la vilaine situation dans laquelle elle se trouve à la suite des actes arbitraires pratiqués par le commandeur de l'Ordre.
Les 4 représentants de la ville lui disent que la population trouve insupportable le fait que, quand un habitant sans enfant décède, tous ses biens reviennent en héritage à l'Ordre des Hospitaliers. Elle trouve également injuste d'avoir à payer le commandeur de l'Ordre à chaque fois que l'un d'entre eux veut se marier. A celà s'ajoute l'irritation des paysans à qui l'Ordre confisque le foin de leurs prés !
La 4ème source de mécontentement des habitants de Bourganeuf concerne la réquisition systématique de leurs charrettes et de leurs animaux. Le pire de tout est que les exigences du commandeur de l'Ordre des Hospitaliers commencent à vider la ville, les étrangers refusant de venir s'installer à Bourganeuf et les habitants ruinés quittant désormais un endroit si dur à vivre.
C'est pourquoi la population a décidé de négocier avec le grand maître : elle accepte de payer au commandeur de Bourganeuf une rente de 10 livres en échange de son renoncement aux servitudes arbitraires qu'il pratique. Les habitants proposent également de lui donner 4 voitures de foin par an et se propose pour une corvée annuelle de transport de 5 jours, au grand maximum.
Aprés avoir écouté les 4 délégués et pris conseil auprés de 3 frères de l'Ordre, le grand maître accepte leurs propositions et, le 19 avril, signe un document qui accorde aux habitants de Bourganeuf le droit d'hériter des biens des membres de leur famille. Ils auront également la liberté de se marier comme ils l'entendent (aprés avoir réglé à l'Eglise les droits à acquitter, bien entendu).
Par ailleurs, à compter de ce jour, le commandeur n'a plus le droit de se servir à sa guise dans le foin des habitants (en dehors des 4 charrettes auxquelles il a droit). Au mois de mai 1327 (soit 19 ans plus tard), Charles IV, roi de France, confirme toutes ces décisions. L'acte royal est ensuite transcrit dans le registre du Trésor des Chartes mais...
Bizarrement, la charte signée par Foulques de Villaret, grand maître de l'Ordre des Hospitaliers, ne figure nulle part dans le Cartulaire général de l'Ordre des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem (où elle aurait dû, en toute logique, être retranscrite)... "Bizarre ? Vous avez dit bizarre ? Comme c'est bizarre !".